ON REFAIT L'EXPO ...
28 Juin 2021
Suite du "Quelle belle année 1971" du mois de Juin avec ce chef d’œuvre absolu de la folk music des années 70's, cet album "BLUE" de JONI MITCHELL qui a marqué l'année 1971.
Je commence par la chronique de Bertrand Bouard dans le hors-série Rock & Folk habituel.
Combien d’âmes en peine ce disque a-t-il consolées depuis quatre (ndr : cinq) décennies ? Album étalon de la rupture amoureuse, « Blue » possède de mystérieuses vertus, qui ne s’épuisent jamais vraiment. En 1971, Joni Mitchell traverse des temps troublés. Après des années de dèche au Canada, la chanteuse de l’Alberta, 28 ans, est devenue la nouvelle égérie féminine du folk américain, grâce à une série de succès dont « Woodstock », offert à Crosby Stills Nash & Young. Relocalisé à Laurel Canyon, épicentre, alors, de la scène californienne, Joni côtoie de près le quatuor : après David Crosby, producteur de son premier album, Joni Mitchell vit une longue liaison avec Graham Nash. Lorsque celle-ci implose, Mitchell, dévastée, s’envole pour Athènes, s’immerge deux mois dans une communauté hippie en Crète qui lui inspire « Carey », avant de passer par Paris et l’Espagne, où elle compose « California ». Ces deux chansons sont les plus enjouées de l’album qu’elle enregistre à son retour aux Etats-Unis, dans un grand état de confusion et d’anxiété. « Blue » s’ouvre par une déclamation amoureuse où affleurent vite entraves et doutes, et le chant, d’une sidérante sincérité (voire l’incroyable climax sur le pont), transmet la moindre nuance de ces vertiges émotionnels (« All I Want »). Album du manque, du doute, de la mélancolie, « Blue » évoque la nostalgie de l’innocence enfantine à travers une mélodie pure comme la neige (« River »), l’abandon de sa fille quelques années plus tôt (« Little Green »), les mises en garde cyniques d’amants passés (« The Last Time I Saw Richard »), l’amour irrépressible même s’il fait saigner (« A Case of You »). A ses confessions très personnelles qui choqueront certains – Kris Kristofferson lui reprochera de ne rien garder pour elle – la Canadienne fournit un écrin très épuré, s’accompagnant au piano, au Dulcimer ou à la guitare, avec l’appui ponctuel de James Taylor et Stephen Stills. Son jeu de guitare repose sur une multitude d’open tuning qui lui ouvrent un champ harmonique immense et permettent ses phrasés aériens si singuliers, qui commencent à lorgner vers le jazz et ses mélodies sublimes. Mise à nu totale, « Blue » transcende les fêlures de son auteure pour toucher à l’universel. Joni Mitchell ne baissera plus jamais la garde de la sorte et la chanteuse folk fragile glissera vers l’observatrice cinglante de ses contemporains en même temps que sa musique se jazzifiera.
Bertrand Bouard
Voici le « Woodstock », offert à Crosby Stills Nash & Young.
Joni Mitchell Blue, harmonies virginales et poésie désabusée
Elle arrête alors les tournées pour entamer un périple à travers l'Europe durant lequel est composée la majorité des titres de son nouvel album Joni Mitchell Blue. Magnifiquement empreint de ...
Les spéculations sont nombreuses en ce qui concerne l’attribution des chansons à leur prétendants respectifs. A la sortie de l’album, le magazine Rolling Stone publie une carte qui relie ses chansons à ses amants successifs : David Crosby et Stephen Stills (« Troubled Child »), Graham Nash (« Hey Willy »), Neil Young, James Taylor (« My Old Man » sur BLUE), Leonard Cohen et le batteur John Guerin. Elle n’aura qu’un commentaire, laconique :
« J’ai le sentiment de n’être mariée qu’à mon art. »
Jamais Joni Mitchell ne s’est autant mise à nu que sur cet album : elle demande que pour ses prises de chant, tous les musiciens quittent le studio hormis l’ingénieur du son.
Soutenue par Stephen Stills à la guitare, elle y joue pour la première fois du Dulcimer, un instrument à cordes d’origine celte auquel elle s’est familiarisée pendant son voyage (voir la vidéo ci-dessous de "A case of You").
Vocalement, Joni Mitchell s’inspire de James Taylor s’accordant plus de liberté dans ses inflexions en intégrant un phrasé proche du jazz. Ainsi, « Carey », « California », « River » et « Blue », sont écrits lors d’un séjour et d’une tournée en Europe avec Jackson Browne.
Égrenant chanson après chanson ses regrets, ses remords, sa douleur, peut-être a-t-elle réalisé l’album de rupture final. Le minimalisme susurré de « Blue » reste également sa plus belle réussite musicale. Stephen Stills et James Taylor lui donnent un coup de main ça et là, mais, sur California, Carey et This Flight Tonight, on entend Joni seule, seule avec sa mélancolie déchirante.
L'album est composé de 10 titres, 5 chansons par face, toutes de durée classique, entre 3 et 4 minutes.
La première face est plus courte et composée de 5 titres de 3 minutes. La musique est dépouillée à l'extrême, Joni, souvent seule, s'accompagnant soit au piano soit à la guitare sèche ou au dulcimer, comme sur le premier titre "All I Want". C'est une déclaration de foi : elle y narre son désir d’aventure et d’épanouissement et son vœu d’être une amante aux petits soins.
"All I really really want our love to do
Is to bring out the best in me and in you too
All I really really want our love to do
Is to bring out the best in me and in you
I wanna talk to you, I wanna shampoo you
I wanna renew you again and again"
"My Old Man" au piano ressemble à du Neil Young, période (à venir en 1972) "Harvest" et la voix cristalline de Joni est très haut perchée.
La suivante "Little Green" est un hommage poignant à sa fille qu’elle a choisie de faire adopter quelques années plus tôt.
"Child with a child pretending
Weary of lies you are sending home
So you sign all the papers in the family name
You're sad and you're sorry but you're not ashamed
Little green have a happy ending"
Tous les titres sont magnifiques et "Carey" est un des sommets de l'album.
Les paroles sonnent magnifiquement, sur une mélodie enjouée et de haute volée !
"Maybe I'll go to Amsterdam
Maybe I'll go to Rome
And rent me a grand piano
And put some flowers 'round my room
But let's not talk about fare-thee-wells now
The night is a starry dome
And they're playin' that scratchy rock and roll
Beneath the Matala Moon"
La première face se termine sur le titre "Blue" et sa poésie maritime.
"Blue here is a shell for you
Inside you'll hear a sigh
A foggy lullaby
There is your song from me"
La 2ème face commence par la chanson qui est peut-être la plus connue (de l'album, pas de Joni :), et ce "California" est une merveille où la voix de Joni nous transporte à paris et au delà ! A noter James Taylor (encore lui) à la guitare acoustique.
"Sitting in a park in Paris France
Reading the news and it sure looks bad
They won't give peace a chance
That was just a dream some of us had"
Suit "This Flight Tonight", qui n'est pas la plus marquante mais qui est très rythmée avec Joni seule à la guitare sèche, titre qu'elle aurait pu également offrir au quatuor CSN&Y.
"You got the touch so gentle and sweet
But you've got that look so critical
Now I can't talk to you baby
I get so weak
Sometimes I think love is just mythical"
L'album se conclut sur les 3 titres les plus longs (4mn) à commencer par "River" où on retrouve la belle au piano. Encore un chef d'oeuvre de mélodie et de poésie. Une chanson éternelle qui coule à nos oreilles !
"I'm so hard to handle
I'm selfish and I'm sad
Now I've gone and lost the best baby
That I ever had
I wish I had a river I could skate away on"
"A Case of You" est encore une chanson énorme, un classique, encore un, où toute la sensibilité de Joni Mitchell nous arrive en pleine figure et nous donne la chaire de poule (voir la vidéo ci-dessous, la classe et la facilité de la dame au dulcimer).
"Oh, I could drink a case of you darling
Still I'd be on my feet
I would still be on my feet"
Le disque bleu au blues jazzy se termine avec Joni au piano sur "The Last Time I Saw Richard". où 'elle revisite son premier mariage avec une certaine amertume, encore et toujours agrippée à ce sentiment de vulnérabilité' (extrait du site musiqxxl.fr).
t la voix de Joni nous transporte à Par
Je finis sur cet historique concert en 1970 à l'Ile de Wight, JONI au sommet de son art; où elle joue quelques titres du futur "Blue" !
Voir à 14'10, le début de "Woodstock" (et un gars qui fait un malaise dans le public, d'où l'inquiétude sur le visage de Joni qui venait de demander au public de l'aider car elle avait le tract).
A 22', début mouvementé de "My Old Man" et le coup de gueule de Joni au bord des larmes "Give us some respect" !
Puis "California" à la 29', au dulcimer !
Elle enchaîne à la 34' avec son méga tube "Big Yellow Taxi" puis finit par "A Case Of You" à partir de 52' pendant le générique de fin.